Societé
Minimalisme à l’heure du capitalisme, entre lifestyle et politique Roseaux, magazine féministe



Le minimalisme est très en vogue en ce moment. Mais au-delà d’Instagram et de Pinterest, cette philosophie de vie met en lumière le ras-le-bol de la surconsommation.

 

Ça y est, c’est la semaine du Black Friday et des bonnes affaires ! Bien évidemment, nous te souhaitons de trouver toute ta wish liste à moitié prix, mais cela nous semblait être aussi le moment idéal pour te parler de minimalisme. Parce que la consommation se doit d’être responsable, et parce que nous avons tou•te•s envie de vivre dans des espaces qui respirent, évitons de nous faire engloutir par des objets inutiles. Le minimalisme, tu en as sûrement déjà entendu parler. Tu as surement déjà vu ces vidéos sur YouTube où on t’explique comment vivre avec seulement sept objets, et ces photos Instagram d’intérieurs aux murs immaculés. En réalité le minimalisme est bien plus que cela. Il ne s’agit pas de se résoudre à tout jeter pour vivre, manger et dormir par terre, mais bien d’améliorer son quotidien. Nous non plus, on ne veut pas vivre dans un white cube, ni dans une tiny house de 10m2.

 

Il ne s’agit surtout pas de te priver, mais plutôt de t’offrir le meilleur de ce que tu peux avoir : des objets que tu aimeras et que tu utiliseras vraiment. Alors, si tu adores cette veste à paillettes, le fait que tu ne la portes que deux fois par an ne signifie pas qu’il faille la jeter. Éloignons les sacs poubelles et réfléchissons d’abord aux possessions qui nous rendent heureux•ses.

 

As-tu vraiment besoin de ça ?

 

Avoir le meilleur signifie qu’il faut penser durable. C’est tellement difficile de mettre plus de 50 euros dans un vêtement quand on n’en a pas l’habitude, qu’on peut vite se sentir découragé•e. Pour changer de perspective, je te conseille de te poser la question suivante : combien de temps ce vêtement va-t-il te durer ? Tente d’évaluer un objet en fonction de sa durée de vie. On peut dire qu’un vêtement de qualité te coûtera moins cher qu’un H&M parce que tu le porteras beaucoup plus longtemps. Cela s’appelle la slow-fashion, s’offrir de belles pièces en évitant les achats impulsifs. Bien sûr, nous n’avons pas tou•te•s les moyens de nous habiller avec des vêtements fair-trade, fabriqués en France, etc. Dans ce cas, le mieux est de limiter tes achats, en ne prenant que ce dont tu as besoin et en privilégiant les friperies.

 

Mais même si tu en as les moyens, il est important de réfléchir avant d’acheter une pièce. Bien sûr, tu tires un bénéfice de l’achat d’un objet, mais il y a aussi des avantages à ne pas l’acheter : tu gagnes de la place et tu ne te sens pas coupable d’avoir des pièces qui portent encore des étiquettes. As-tu vraiment besoin de ça ou s’agit-il d’un tampon émotionnel ? Si ça ne va pas au travail, acheter cette nouvelle jupe n’arrangera pas la situation. Alors qu’acquérir une pièce intemporelle, que tu désires depuis longtemps, te procurera une satisfaction immense. Et puis, parfois, le vrai luxe n’est pas un sac Chanel, mais ce dentifrice avec un packaging qui ensoleille ton quotidien.

 

On se doit également de parler des souvenirs de voyage. C’est tellement tentant de ramener un petit quelque chose de vacances. Sauf que ces petits quelques choses se transforment, comme par magie, en bazar une fois chez toi. Ce joli lustre qui t’as tant plu à Marrakech se marie-t-il vraiment avec ton intérieur ? Et puis, les souvenirs sont surtout dans nos têtes, nous n´avons pas forcément besoin d’un magnet !

 

Le fait de posséder moins te permettra aussi de libérer de l’espace dans ton chez toi. Un intérieur plus vide donne un sentiment de luxe, car tout parait plus grand, plus spacieux. Moins de meubles et plus d’air. Et c’est tellement plus facile à ranger !

 

Passons à la cuisine. Pour éviter le gaspillage alimentaire, essaye de n’avoir que des choses dont tu se sers dans ton frigo. C’est pareil que pour les vêtements, achetons moins mais de meilleure qualité. On peut par exemple opter pour des épices en petite quantité ou en vrac. Et il n’y a aucune raison d’accumuler des tonnes de conserves chez toi alors que le supermarché est au coin de ta rue. Cela encombre ton espace. Pense à ton lieu de vie comme si c’était l’intérieur de ta tête, une partie de toi. Tu n’as besoin que de ce qui est important dans le moment présent.

 

Réinventer le monde

 

Le minimalisme, c’est aussi une action politique. En évitant la surconsommation, on boycotte l’exploitation des populations pauvres, des animaux, des déchets envoyés à l’autre bout du monde. La consommation raisonnée est l’une de nos meilleures options pour nous battre contre le capitalisme. Car le minimalisme, avant d’être un goût esthétique, est une décision engagée. Nous vivons dans une société agressive où notre désir est en permanence sollicité afin qu’on acquière des objets plus ou moins utiles. On nous promet de combler nos failles et de nous consoler si on achète des produits. Mais malheureusement, cela a un impact désastreux sur l’environnement et la majorité des “bonnes affaires” est produite par des personnes travaillant dans des conditions abjectes, dont 70,1 % de femmes selon le Global Slavery Index (l’Indice mondial de l’esclavage).

 

L’industrie textile est par exemple particulièrement sujette à l’esclavage moderne, on ne compte plus le nombre de scandales et les mesures minimes (voir leur absences) prises par les grands groupes industriels. L’un des derniers en date étant l’exploitation de réfugié•e•s syrien•ne•s en Turquie, dont une bonne partie d’enfants par les différentes marques de prêt à porter, dont ZARA, Mango et ASOS. Elle est aussi l’une des plus polluantes au monde, juste après celle du pétrole. Même s’il n’y a pas de chiffre unique et fiable, les études varient entre 3 % et 10 % des émissions de CO2 mondiales. Or 3 % représente déjà 1.2 milliard de tonnes de CO2, donc plus que la somme du transport maritime et aérien international. De plus, seules 13 % des matières premières qui constituent les vêtements sont recyclés en fin de vie. Le reste est enfoui ou incinéré, généralement dans des pays en voie de développement. Il y a une telle surabondance de vêtements dans le monde que même les œuvres de charité n’arrivent pas à écouler leurs stocks, et sont obligées de les revendre à des industriels qui les envoient dans des PVD soit pour les vendre ou, plus souvent, pour les laisser se décomposer dans des décharges à ciel ouvert.

 

En ce qui concerne le gaspillage alimentaire, il est estimé rien qu’en France à 10 millions de tonnes, 10 milliards de kilos par an. Bien sûr il ne s’agit pas uniquement de ce qu’on jette en tant que consommateur•ice : par exemple, si les fruits et les légumes ne correspondent pas à des standards ils sont jetés directement après la récolte. Ce gaspillage a bien sûr des effets sur l’environnement : pollution de l’eau à cause des pesticides et des engrais chimiques, utilisation inutile de ressources, destruction des sols par l’agriculture intensive.

 

Alors privilégions, si nous en avons les moyens, les circuits courts et l’agriculture raisonnée, Refusons la surconsommation ! Et qui sait, ensemble, on pourra réinventer le monde. Un monde où aucun enfant ne travaille, où personne n’est obligé de ruiner sa santé pour répondre à nos moindres désirs.

 

Bien sûr, le minimalisme est une philosophie de vie bien plus large. On peut être minimaliste à tout niveau : ne garder que les relations qui nous sont les plus bénéfiques, faire attention à la surconnection et à la surinformation. En quelques mots : ayons moins et aimons mieux. Parce que less is definetely more !

 

Si vous voulez en savoir plus, on vous conseille ces quelques ressources :

Chaines YouTube  :

En français  :
Marjorie Peyric
Vivre avec moins

En anglais  :
Jenny Mustard
Madeleine Olivia
Sarah Therese

Articles :

Sur la pollution textile et agroalimentaire :

Le textile, deuxième industrie la plus polluante : mais pourquoi ?

Ce qu'il se passe réellement lorsque vous donnez vos vêtements à une oeuvre de charité

La mode : une industrie très polluante qui pratique l'esclavagisme moderne

Gaspillage alimentaire : définition, enjeux et chiffres

Sur le minimalisme d'un point de vue féministe :

Le minimalisme est-il un "truc de filles" ?

Livres :

Dominique Loreau « L’art de la simplicité » 

Ranger : L'étincelle du bonheur. Marie Kondo 

Le bonheur est dans le peu, Francine Jay

 





Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.