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Jeunesse sous pression

La voix d’une adolescente en 2019, entre peur et révolte

Roseaux, magazine féministe  Janna B.



Elles ont le double boulet de la jeunesse et de l’assignation au genre féminin, et pourtant, d’Emma González à Greta Thunberg, les lycéennes mènent la danse de la révolte, de l’indignation et de l’action concrète. Elles font honte aux vieux hommes blancs qui nous gouvernent, elles n’ont jamais été aussi visibles, et c’est probablement le signe d’espoir le plus fort de ces dernières années. Léna est, elle aussi, jeune, lycéenne, féministe et révoltée. Et elle a quelque chose à dire.

À l’heure où je vous écris, nous sommes le 20 août 2019, j’ai 16 ans. Depuis ma maison en campagne normande, tout semble paisible. Pourtant, je le sais, mon avenir est menacé. Pire encore, toute la jeunesse est menacée. Si j’écris, c’est pour une prise de conscience, et surtout, pour de l’action.

La Terre est dans un état pitoyable. De partout, on nous dit que le mal est fait. On nous laisse le sale boulot. Nous sommes les futures forces dirigeantes, mais il est flagrant que les forces de la nature sont bien plus puissantes. Je vis dans un siècle marqué par une réelle explosion démographique. Selon l’ONU, d’ici 2050, nous devrions être 9,8 milliards sur Terre, alors que la famine tue des millions d’individus. Beaucoup de couples aimeraient avoir des enfants. Et pourtant, certains prévoient l’extinction de l’espèce humaine en 2050. Est-ce « donner la vie » l’expression adéquate ? Nous ne voulons pas de ce destin malheureux. Dans ce monde où le capitalisme règne, la vie est moins précieuse que l’argent. L’industrie carbure, laissant des dégâts indélébiles sur notre lieu de vie. Le niveau des océans augmente à un rythme effréné.

Parallèlement, près de la moitié des récifs coralliens a disparu ces trente dernières années. Plus d’un quart des mammifères sont menacés d’extinction. En moins de 50 ans, les populations d’animaux en tous genres ont baissé de 60 %. Déforestation, braconnage, dégradation des forêts, réchauffement climatique, pollution des mers et de l’air : le monde actuel n’est aucunement favorable à la vie des êtres vivants. Nous sommes témoins et coupables de la sixième extinction de masse. C’est pourquoi il faut agir ! Le peu de temps qui nous reste ne nous permet pas de nous reposer sur nos acquis.

La situation a sûrement progressé, bien qu’il soit trop tôt pour en faire le bilan précis. Ce qui est sûr, c’est que le chemin est encore long. Il est hors de question de baisser les bras. La jeunesse a peur. Cette « fin du monde » est terriblement angoissante. Un sentiment de révolte envahit notre génération. Aurélien Barrau, astrophysicien, fait même appel à la révolution écologique : « Si on était tous d’accord, on pourrait faire une révolution pour faire triompher l’écologie contre nos méchants dirigeants ». Le message est clair : seule l’unité nous évitera la catastrophe.

À côté de ça, le sexisme fait partie intégrante de nos vies. Comme toujours, le progrès politique est lent. Les inégalités salariales sont encore énormes. J’entends toujours plus de témoignages de femmes victimes de harcèlement de rue, d’agressions sexuelles… On se sent continuellement en danger, dans une France où nous sommes censé·e·s « demeurer libres et égaux en droits ». La France n’est pas la pire, et c’est peut-être le plus terrifiant. Nous sommes en 2019, et un grand nombre de femmes sont battues, torturées, réduites au silence, discriminées. La vie semble bien plus dangereuse quand on est une femme, et ce, partout dans le monde.

En outre, s’assumer pleinement s’avère un réel suicide dans certains pays, un combat continuel dans d’autres. En France, être homosexuel·le est synonyme d’insultes, d’agressions, d’exclusion sociale… Dans un autre pays, c’est la torture dans le meilleur des cas, l’exécution dans le pire. Le même sort est réservé à tous les membres de la communauté LGBTQ+. L’intolérance, les agressions, l’ostracisme, dissuadent les humains à être qui ils sont. Être tolérant·e, c’est vivre auprès de différentes cultures, origines, genres, sexes, religions, sans faire de différence. Non, ce n’est pas vivre pacifiquement que vivre auprès d’hommes cisgenres, hétéros et blancs.

Enfin, la montée en puissance de l’extrême-droite en Europe ne présage rien de bon. Jair Bolsonaro, au Brésil, détruit le peu de vie restante en Amazonie. Rodrigo Duterte, aux Philippines, est surnommé « le Trump d’Asie » suite à ses propos violents. Sa guerre anti-drogue fait des milliers de morts, à cause de fouilles d’une extrême brutalité et d’assassinats systématiques, souvent mis en scène par les autorités. En Espagne, Vox est de retour. En Italie, on craint la victoire de la Ligue et sa politique antimigratoire.

Bref, notre monde actuel est une bombe à retardement. Ce compte-rendu est loin d’être exhaustif. Ce qui est sûr, c’est qu’avant que tout parte en fumée, nous nous devons d’agir. Nous devons transformer notre angoisse et notre indignation en une énergie redoutable. La jeunesse est bien la seule à pouvoir sauver notre lieu de vie. Et pitié, faites que votre âge ne freine pas votre envie de lutter pour un avenir plus serein. La militante écologiste Greta Thunberg a 16 ans, et a pris la parole à la COP24, devant le parlement britannique, à l’Assemblée nationale française… Son influence dans le monde est considérable. Cet impact, elle l’a tellement voulu qu’elle l’a eu. C’est une jeune femme comme nous. Son parcours doit être un modèle pour chacun·e d’entre nous.

Nous sommes capables de nous battre contre les choix des générations antérieures. Le jeune âge n’est pas une frontière, mais plutôt une marge temporelle qu’il faut exploiter main dans la main, dans l’espoir de désactiver la bombe qu’on nous a laissée sur notre chemin. Le mal est fait, certes, mais le bien reste à faire. Concrètement, le pouvoir est entre nos mains. Il faut changer nos habitudes. Beaucoup disent que l’état pitoyable de la Terre est dû à l’industrie, et que nous ne pouvons rien faire. Or, nous sommes les consommateurs, nous sommes les principales sources de revenus des entreprises. Dans notre société capitaliste, l’argent est puissant. Alors la moindre des choses, c’est de boycotter. Nous pouvons mettre à mal de grandes firmes en réduisant drastiquement leurs revenus.

Au-delà de ça, parlez avec vos amie·e·s. Défendez-les. Ne restez jamais muet·te·s face à des aberrations. Montrez-leur votre soutien.

De manière plus générale, montrez votre opinion. Incarnez-la. Votez. Parlez. Agissez. Votre voix est importante et puissante. Vous êtes les propres acteurs de vos vies et de toutes celles à venir. C’est à vous de choisir la fin du film. Ensemble, nous sommes capables d’éviter la catastrophe. Gardons espoir, et battons-nous.





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